Unifiant sa jurisprudence en la matière, la Cour de cassation décide que, sauf disposition contraire, il appartient à l’employeur de prouver qu’il a bien mis le salarié en mesure de prendre ses congés, que ces derniers soient d’origine légale ou conventionnelle

 

En principe, un salarié qui n’a pas pu prendre ses congés payés perd son droit à congés et ne peut réclamer aucune indemnité compensatrice à ce titre. Toutefois, il peut obtenir réparation s’il s’est trouvé dans l’impossibilité de prendre ses congés du fait de l’employeur.

Pendant longtemps, la Cour de cassation a jugé que c’était au salarié, prétendant avoir été empêché de prendre ses congés, d’établir la faute de l’employeur. Mais, sous l’influence du droit européen, la chambre sociale de la Cour de cassation a modifié sa jurisprudence s’agissant du congé légal principal de 4 semaines, garanti par la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003.

Elle a jugé qu’il appartenait à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier avoir accompli à cette fin les diligences lui incombant légalement (Cass. soc. 13-6-2012 n° 11-10.929 FS-PBR : RJS 8-9/12 n° 718).

 

Un régime de la preuve spécifique au congé principal de 4 semaines

Ainsi, en cas de demande d’un salarié soutenant avoir été dans l’impossibilité de prendre son congé principal, le juge doit s’assurer que l’employeur a bien satisfait aux obligations suivantes : information des salariés de la période de prise de congés au moins deux mois avant l’ouverture de la période et communication de l’ordre des départs en congé à chaque salarié un mois avant son départ. A défaut pour l’employeur d’avoir respecté ces formalités, le juge considère qu’il n’a pas mis le salarié en mesure de prendre ses congés et le condamne à verser à l’intéressé des dommages et intérêts correspondant aux congés non pris.

Postérieurement, la Haute Juridiction a considéré que ce régime de preuve ne s’appliquait pas à la 5e semaine de congés payés et aux congés conventionnels (Cass. soc. 12-5-2015 n° 13-20.349 FS-PB : RJS 7/15 n° 490). Il appartenait au salarié d’établir n’avoir pas pu prendre ces congés du fait de l’employeur.

Cette coexistence de 2 régimes de preuve était source de difficultés et de complexité pour le juge, car il devait en premier lieu déterminer l’origine du congé non pris (congé principal ? 5e semaine ? congé conventionnel ?), alors que la loi ne permet pas de déterminer à quel titre les congés ont été pris. En outre, pour un salarié réclamant l’équivalent de 2 semaines de congés payés légaux, le juge pouvait être susceptible d’appliquer deux régimes de preuve distincts, l’un correspondant au congé principal et l’autre à la 5e semaine. On a vu plus simple comme règle !

 

D’un infléchissement à un alignement total du régime de la preuve

Dans un souci de cohérence et de simplification, la Cour de cassation a infléchi, dans un premier temps, sa jurisprudence en appliquant à la 5e semaine de congés payés le régime de la preuve du congé principal (Cass. soc. 26-1-2017 n° 15-26.202 F-D : RJS 4/17 n° 270). Ainsi, la différence ne subsistait plus qu’entre les congés d’origine légale et ceux d’origine conventionnelle.

Par un arrêt du 21 septembre 2017, destiné à une large publication, la chambre sociale unifie totalement sa jurisprudence et juge que, sauf dispositions contraires, la même règle de preuve s’applique aux congés d’origine légale ou conventionnelle, s’ajoutant aux 4 semaines garanties par le droit de l’Union.