Dans un arrêt du 13 février 2019 (n°17-11487), publié au Bulletin, la Cour de cassation se prononce sur le régime social de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et notamment sur son assujettissement à la CSG-CRDS, lorsque l’indemnité est accordée à un salarié employé dans une entreprise de moins de 11 salariés.

1 – Faits et procédure.

Dans le cas d’espèce soumis à la Haute Juridiction, un salarié licencié pour motif économique avait obtenu devant la Cour d’appel la somme de 49.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société employant moins de 11 salariés, l’article L..1235-5 du Code du travail, dans son ancienne version antérieure aux ordonnances Macron, était applicable.

Dès lors, aucun minimum légal n’était imposé à la Cour d’appel dans le cadre de l’appréciation du préjudice du salarié suite à son licenciement.

Dans le cadre de l’exécution de la décision de la Cour d’appel, l’employeur procède au paiement de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en prélevant sur cette somme de la CSG et de la CRDS.

Le salarié, contestant ces prélèvements, fait délivrer un commandement de saisie-vente correspondant aux contributions sociales prélevées selon lui de manière illicite.

L’employeur saisit le Juge de l’exécution afin de contester ce commandement.

Dans un arrêt du 10 novembre 2016, la Cour d’appel de Bourges a ordonné la mainlevée du commandement de saisie-vente, estimant que la fraction de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse excédant le montant de l’indemnité légale de licenciement devait être assujettie à la CSG-CRDS.

2 – Portée de l’arrêt du 13 février 2019.

Dans son arrêt du 13 février 2019, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, au visa de l’article L.136-2-II, 5° du Code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige et antérieure aux ordonnances Macron.

La Cour de cassation rappelle ainsi que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est exonérée de CSG-CRDS pour la fraction n’excédant pas le minimum d’indemnisation de 6 mois de salaire prévu par l’ancien article L.1235-3 du Code du travail.

La Cour de cassation avait déjà eu à se prononcer sur cette question dans un arrêt du 19 avril 2005 (n°03-30759).

La Cour de cassation avait alors estimé que l’exonération de CSG-CRDS ne pouvait porter que sur « le minimum légal de six mois fixé par l’article L.122-14-4 du Code du travail ».

Néanmoins, cet arrêt portait sur l’assujettissement à CSG-CRDS de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse versée à un salarié ayant plus de 2 ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise de plus de 11 salariés.

En revanche, et à notre connaissance, la Cour de cassation ne s’était jamais prononcée sur la question de l’assujettissement à CSG-CRDS de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse versée à un salarié ayant moins de 2 ans d’ancienneté ou dont l’entreprise emploie moins de 11 salariés.

C’est désormais chose faite par l’arrêt du 13 février 2019.

La Haut Juridiction confirme ainsi que les dommages et intérêts versés dans le cadre de l’ancien article L.1235-5 du Code du travail sont exonérés de CSG-CRDS dans les mêmes conditions que les indemnités versées dans le cadre de l’ancien article L.1235-3 du Code du travail.

En cela, la Cour de cassation suit les dispositions de la circulaire n°2001-022 du 25 janvier 2001.

En effet, l’Administration admettait, au point 32 de cette circulaire, que dans une telle hypothèse, le salarié bénéficiait des mêmes conditions d’exonération de CSG-CRDS.

Ainsi, un salarié ayant moins de 2 ans d’ancienneté (ou appartenant à une entreprise de moins de 11 salariés), voit son indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse exonérée de CSG-CRDS dans la limite de 6 mois de salaire.

À cet égard, il convient de rappeler que l’ancien article L.1235-5 du Code du travail ne prévoyait aucun minimum légal, le texte se référant uniquement au « préjudice subi » par le salarié.

La Cour de cassation fait donc une interprétation extensive de l’ancien article L.136-2-II,5° du Code de la Sécurité sociale afin d’aligner le régime social applicable aux licenciements sans cause réelle et sérieuse, quelle que soit la situation du salarié et de l’entreprise.

3 – Quid de l’exonération de CSG-CRDS après les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 ?

Les ordonnances dites « Macron » du 22 septembre 2017 ont mis en place un barème d’indemnisation en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ce barème est contesté par certains juges du fond.

Désormais, en cas de licenciement considéré comme sans cause réelle et sérieuse, l’indemnisation du salarié est encadrée par un montant minimum et un montant maximum, déterminé en fonction de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise.

Jusqu’à ces ordonnances, seul un montant « plancher » de 6 mois de salaire était déterminé pour les salariés ayant plus de 2 ans d’ancienneté et dont l’entreprise emploie plus de 11 salariés.

La fraction de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse exonérée de CSG-CRDS était fixée sur la base de ce plancher, à savoir 6 mois de salaire.

Or, le Code du travail prévoyant désormais un plancher (compris entre 0 et 3 mois de salaire) et un plafond (de 1 à 20 mois de salaire), la question se pose de savoir quel montant sera pris en considération pour la détermination de l’assiette de CSG-CRDS.

À ma connaissance, la jurisprudence ne s’est pas encore prononcée en la matière.

Néanmoins, des éléments de réponse peuvent être trouvés aux termes de la circulaire du 25 janvier 2001 et des arrêts du 19 avril 2005 et 13 février 2019 précités.

En effet, la circulaire, en son point 32, indique expressément que n’est pas soumis à CSG-CRDS le « montant minimal » des indemnités mentionnées à l’ancien article L.122-14-4 du Code du travail relatif à l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

De même, la Cour de cassation estime, dans ses arrêts de 2005 et 2019, que l’exonération ne peut porter que « sur le minimum légal de six mois fixé » par le Code du travail.

Dès lors, en interprétant strictement la circulaire de 2001 et les arrêts de la Cour de cassation, il apparait que seul le montant minimum d’indemnisation du licenciement abusif devrait être exclu de l’assiette de la CSG-CRDS.

Cependant, ces positions de l’Administration et de la Cour de cassation sont intervenues en l’absence de montant maximum prévu par le Code du travail, ce qui est désormais le cas (sous réserve que le barème Macron soit déclaré conforme aux traités internationaux), montant qui pourrait être pris en considération pour déterminer le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse exclues de l’assiette de la CSG-CRDS.