L’employeur ne peut pas accéder à la messagerie personnelle du salarié, sans son accord, quand bien même le salarié y accède via son ordinateur professionnel. Ces échanges sont couverts par le secret des correspondances.
La Cour de cassation est régulièrement saisie de contentieux liés à l’utilisation des outils informatiques par les salariés. La frontière entre vie professionnelle et vie personnelle s’estompe avec ces dispositifs et il n’est pas toujours simple de savoir ce qui relève du professionnel et ce qui n’en relève pas.
Des conversations personnelles comme mode de preuve
L’utilisation d’une messagerie instantanée sur l’ordinateur de travail fait partie des situations où la frontière est poreuse. Dans l’affaire qui était soumise à la Cour de cassation le 23 octobre 2019, une salariée est licenciée pour faute grave. Il lui est reproché d’avoir transféré des documents de l’entreprise lors de propos échangés avec une collègue sur leurs ordinateurs de travail, par la voie d’une messagerie instantanée.
L’employeur avait estimé tout à fait légitime le fait d’avoir accédé à la messagerie de la salariée, sans son autorisation, et de les utiliser comme mode de preuve. Selon l’employeur, le fait pour la salariée de n’avoir pas identifié ces échanges comme personnels alors qu’elle utilisait l’ordinateur professionnel rendait cette investigation possible de la part de l’employeur.
Des preuves illicites lorsqu’il s’agit de messageries personnelles
Mais ni la cour d’appel, ni la Cour de cassation ne vont se ranger à cette argumentation. Accéder à ces échanges en pénétrant dans la messagerie personnelle de la salariée sans son autorisation constitue un mode de preuve illicite, estiment ainsi les juges. « À l’évidence, un tel compte de messagerie est personnel et distinct de la messagerie professionnelle sans qu’il soit besoin d’une mention « personnel » ou encore « conversation personnelle » », souligne la cour d’appel.
La présomption selon laquelle toutes les informations qui circulent via l’ordinateur professionnel est professionnel doit être écartée dès lors que les messages l’ont été sur la messagerie personnelle de la salariée. Les juges du fond « ayant constaté que les messages électroniques litigieux, échangés au moyen d’une messagerie instantanée, provenaient d’une boîte à lettre électronique personnelle, distincte de la messagerie professionnelle dont la salariée disposait pour les besoins de son activité, la cour d’appel en a exactement déduit qu’ils étaient couverts par le secret des correspondances ».