Est nulle la transaction conclue en l’absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
La récente décision de la Cour de cassation à ce sujet [Cass. soc., 10 oct. 2018, pourvoi n° 17-10.066, arrêt no 1418 FS-P+B] a été basée au visa des articles L. 1232-6 et L. 1231-4 du Code du travail, ensemble l’article 2044 du Code civil, dans leur rédaction applicable à la cause : « alors qu’il résultait de ses constatations que la transaction avait été conclue en l’absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ce dont il résultait qu’elle était nulle, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
On pourrait a priori penser que la Cour de cassation pèche par excès de rigueur. Il est en effet de jurisprudence constante que l’envoi de la lettre recommandée avec avis de réception visée à l’article L. 1232-6 du Code du travail n’est qu’un moyen légal de prévenir toute contestation sur la date de notification du licenciement (Cass. soc., 16 juin 2009, n° 08-40.722), ce qui a conduit ce même arrêt à valider la remise en mains propres de la lettre de licenciement, laquelle peut être prouvée par tout moyen y compris par témoignage (Cass. soc., 29 sept. 2014, n° 12-26.932). Pourquoi ne pas valider une transaction dont il est possible d’établir avec certitude, fut-ce avec d’autres moyens de preuve que le recommandé avec accusé réception, qu’elle a été conclue postérieurement à la notification du licenciement ?
L’articulation licenciement/transaction obéit toutefois à une mécanique plus rigoureuse qui justifie une application littérale de l’article L. 1232-6 du Code du travail selon lequel « lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception ». Ce mode de notification est en effet seul apte à garantir la réalité de la date de notification, ce qui n’est pas le cas de la remise en main propre de la lettre de licenciement puisqu’il est possible aux parties d’antidater cette remise. L’arrêt du 10 octobre 2018 ne fait d’ailleurs que conforter un principe bien établi : « il résulte de ces textes qu’une transaction, ayant pour objet de mettre fin, par des concessions réciproques, à toute contestation née ou à naître résultant de la rupture du contrat de travail, ne peut être valablement conclue qu’après notification du licenciement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception » (Cass. soc., 18 févr. 2003, n° 00-42.948). De cette jurisprudence, il avait déjà été déduit qu’une lettre remise en main propre donnait lieu à une transaction nécessairement nulle (Cass. soc., 25 janv. 2011, n° 09-41.650).
Ainsi, le licenciement notifié par lettre remise en main propre reste parfaitement valable dès lors que la lettre est suivie d’une décharge du salarié ou que la remise peut être prouvée par tout moyen. En revanche, si l’employeur envisage de transiger, il doit recourir à la notification par lettre recommandée avec avis de réception. À défaut, le salarié qui, faut-il le rappeler, est seul à pouvoir demander la nullité de la transaction, pourrait saisir le juge de diverses demandes, la transaction étant privée de l’autorité de chose jugée qui lui est normalement attachée.